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FFF / Mbappé : « La convention de 2010 et le système actuel ont probablement vécu » (Me Charles Amson)

News Tank Sport - Paris - Analyse n°246484 - Publié le 29/03/2022 à 09:03
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Charles Amson, avocat au Barreau de Paris et spécialiste en Droit du Sport - ©  D.R.

« Il est évident que la convention de 2010 proposée aux joueurs de l'équipe de France de football a été rédigée à une époque où les modes de communication étaient totalement différents de ce qu’ils sont devenus. Le système actuel a probablement vécu », explique Charles Amson Fondateur / Avocat @ Cabinet Amson (Amson)
• Avocat au Barreau de Paris. • Docteur en droit (Université Paris-II-Panthéon-Assas), Charles Amson a soutenu, en 2008, une thèse consacrée à La place…
, avocat au Barreau de Paris et spécialiste en Droit du Sport, dans une analyse pour News Tank le 29/03/2022.

Kylian Mbappé Player @ Paris Saint-Germain (PSG)
Activité : joueur de football professionnel Nationalité : française Salaire (2022) : 28 M$ (26,5 M€) Équipe de France : 1e sélection le 25/03/2017 (Luxembourg …
a refusé de participer à une opération marketing destinée aux partenaires de la Fédération Française de Football • Création : 07/04/1919• Produits d’exploitation 2022-23 : 281,9 M€ (contre 274,2 en 2021-22)• Charges 2022-23 : 277,8 M€ (contre 274,3 M€ en 2021-22)• Résultat d’exploitation 2022-23 : + 4,1 M… (Volkswagen Activité : constructeur automobile Création : 1936 Marques : Volkswagen Passenger Cars, Audi, SEAT, ŠKODA, Bentley, Bugatti, Lamborghini, Porsche, Ducati, Volkswagen Commercial Vehicles, Scania… , Uber Eats, Orange Secteur d’activité : télécommunications Création : 1994 (rachat par France Télécom en 2000) Siège opérationnel : Arcueil (France) Zone d’activité : 28 pays en Europe, en Afrique et au… , Xbox, Coca-Cola, Konami Activités de Konami Holdings Corporation : éditeur de jeux vidéo (Konami Digital Entertainment), machines et salles de fitness (Konami Sports Club), machines de jeu et systèmes de gestion de casinos… ) avec tous les joueurs de l'équipe de France, au cours du stage de préparation avant leurs matches amicaux contre la Côte d’Ivoire (2-1, à Marseille le 25/03/2022) et l’Afrique du Sud (à Villeneuve-d’Ascq ce 29/03/2022), au Centre national du football de Clairefontaine (Yvelines) le mardi 22/03/2022.

L’attaquant international du Paris Saint-Germain Activité : club de football professionnel français Bureaux administratifs : 53, avenue Emile Zola, 92100 Boulogne-Billancourt Top sponsors : • Nike (équipementier) : 20 M€ par an de 2014-15 … et son entourage contestent la convention de 2010 relative à la cession du droit collectif à l’image, qui contient notamment les obligations de tout footballeur international vis-à-vis des partenaires de la FFF Fédération Française de Football . Cette convention lie le joueur depuis sa première sélection jusqu'à cinq ans après la dernière. En échange, chaque international reçoit 25 000 euros par match disputé.

« Il y aura une lettre des avocats qui va lui être adressée et à son avocate. On va voir point par point ce qui pose problème. On souhaite améliorer les choses et que les gens soient contents, sponsors et joueurs », a déclaré Noël Le Graët Membre du Conseil / Council Member @ FIFA
• 1964 : VRP Multicartes
, président de la FFF, le 23/03/2022.

« Tout ce qui est sanctions, ça m’embête toujours. Je n’aime pas ce mot-là. Mais il y aura une conversation. Et il y aura une autre opération avec les sponsors à la rentrée, avant d’aller à la Coupe du monde. Je vous assure qu’à ce moment-là, tout sera réglé. Il n’y a pas de bras de fer. Les petits soucis, ça fait partie de la vie », ajoute le président de la Fédération dans L'Équipe du 24/03/2022.

« La FFF semble bien se comporter, pendant les périodes internationales, comme le véritable employeur des joueurs », souligne Me Amson dans son analyse pour News Tank.


« Il convient de mieux articuler cession du droit à l’image collective et conclusion de contrats individuels » (Me C. Amson)

Que peut faire la FFF face à l’attitude de Kylian Mbappé ?

La Fédération Française de Football Fédération Française de Football se retrouve, en pratique, dans une situation très délicate face à son joueur n° 1. 

⚽️ Si elle ne sanctionne pas (ou très légèrement) Kylian Mbappé, elle reconnaît implicitement que la convention qu’elle fait signer aux internationaux honorant leur première cape en équipe de France est mal rédigée ou inadaptée.

Dans cette hypothèse, elle ouvre la porte à d’éventuelles méconnaissances futures de cette convention par d’autres joueurs et envoie le message selon lequel ce document n’aurait pas une véritable portée normative.

Orange, Volkswagen et le Crédit Agricole sur la tenue d'entraînement de Kylian Mbappé au Stade Pierre-Mauroy le 28/03/2022 - ©  FFF / Sportpack / S. Morcel

⚽️ Si, en revanche, elle sanctionnait sévèrement Kylian Mbappé, elle donnerait l’impression d’adopter une réponse disproportionnée à un manquement somme toute assez mineur et survenu à l’occasion d’un rassemblement organisé pour préparer deux rencontres amicales (contre le Côte d’Ivoire et l’Afrique du Sud).

La meilleure solution consisterait sans doute à sanctionner sur le principe Kylian Mbappé, tout en reconnaissant que la convention en cause n’est plus adaptée à l’organisation actuelle du monde sportif et qu’il convient de mieux articuler la cession par les joueurs à la Fédération de leur droit à l’image collective et la conclusion de contrats individuels de cession de leur image avec leurs sponsors principaux.

Que peuvent faire les sponsors ? Une solution autre qu’amiable est-elle possible ?

Il est assez difficile de répondre à cette question sans avoir examiné préalablement la convention.

Cependant, d’après les informations parues dans la presse et notamment dans L’Équipe le 26/03/2022, il ne semble pas que certaines marques et/ou sociétés soient spécifiquement citées dans celle-ci.

A priori, seules des expressions assez générales, telles que celle de « partenaires commerciaux », sont employées.

Cette absence de référence à une marque précise rendrait plus compliquée une éventuelle action en justice de certains sponsors.

Il faudrait, en tout état de cause, pour ces derniers prouver l’existence d’un lien de causalité direct entre le préjudice qu’ils estimeraient avoir subi et la non-participation de Kylian Mbappé à certaines opérations médiatiques ou à certains événements.

La preuve d’un tel lien semble, a priori, difficile à rapporter. 

Tournage d'After Movie Let's play by KM, en décembre 2018 - ©  Verheyden Avocats

Au surplus, d’après les informations de L’Équipe, les infractions non suivies de réclamations de partenaires commerciaux seraient punissables de 10 000 euros d’amende contre 50 000 pour celles entraînant une réclamation : cette rédaction paraît à la fois curieuse et imprécise, car il semblerait très étonnant que la formation d’une simple réclamation non accompagnée de la démonstration du préjudice subi suffise à quintupler le montant de la somme mise à la charge du joueur.

Compte tenu de tous ces éléments, il serait, à mon sens, plus judicieux pour ces sponsors de se prévaloir du manquement du footballeur international à ses obligations pour tenter amiablement de renégocier leurs contrats avec la FFF.

Le cas Mbappé crée-t-il un précédent ?

L’absence volontaire de Kylian Mbappé à la séance photo organisée à Clairefontaine pendant un stage de l'équipe de France, le 22/03/2022, crée inévitablement un précédent.

Sauf à reconnaître qu’il existerait deux catégories d’internationaux, établies sur la base de la notoriété des joueurs, il semble impossible de réserver un sort différent à Kylian Mbappé et aux autres joueurs de l’équipe.

De manière plus générale, cette situation amène à renouveler la réflexion sur la nature des liens entre les internationaux et les fédérations.

Sur la base de la réglementation actuelle, les contrats entre les sportifs et leurs clubs ne sont, en effet, pas suspendus pendant les périodes internationales.

L’article 12.12 de la Convention collective nationale du sport dispose, en effet, que « les conditions dans lesquelles un sportif professionnel sélectionné ou un entraîneur est mis à disposition de l'équipe de France relèvent de la compétence de la fédération, en commun avec la Ligue professionnelle le cas échéant, conformément aux dispositions de l’article R. 132-11 du code du sport ».

Il est ajouté qu’ « en principe, la participation à l'équipe de France n’a aucune incidence sur le lien de travail qui unit les intéressés au groupement sportif qui les emploie (et que) le sportif, et/ou l’entraîneur, est alors réputé remplir auprès de la fédération une mission confiée par son employeur au titre de ses activités salariées, et pour laquelle il conserve l’intégralité de ses droits de salarié. »

Or, il ne semble pas impossible de soutenir que les obligations issues de la convention évoquées plus haut créent un lien de subordination entre les clubs et leurs joueurs.

Autrement dit, la Fédération semble bien se comporter, pendant les périodes internationales, comme le véritable employeur des joueurs.

A terme, pourrait, par suite, se poser la question de la nature de la relation juridique entre les Fédérations et les internationaux.

La Fédération sera-t-elle amenée à renégocier les droits à l’image de ses joueurs ?

 Il est évident que la convention de 2010 proposée aux joueurs a été rédigée à une époque où les modes de communication étaient totalement différents de ce qu’ils sont devenus.

Ce décalage entre le contenu de la convention et la réalité a déjà été à l’origine de difficultés : on se souvient, par exemple, que, peu avant la Coupe du monde 1998, plusieurs joueurs de l’équipe de France avaient demandé à pouvoir utiliser les chaussures à crampons de leur choix, alors même que la Fédération était contractuellement liée depuis 1972 avec adidas Activité : équipementier sportif Marques : adidas, Reebok (fitness) Création : 1924 (le 18/08/1949 sous le nom adidas)CEO : Bjørn GuldenEffectif (2023) : 59 030 salariésChiffre…

Kylian Mbappé, ambassadeur de l'horloger suisse Hublot - ©  KM

L’existence de telles conventions pose aujourd’hui, à l’évidence, de nombreuses questions, parmi lesquelles j’identifierais plus particulièrement celles-ci, curieusement assez peu soulevées ces derniers jours :

  • Quelle est la nature de l’obligation pesant sur les joueurs pour signer ce document ?

Autrement dit, un joueur qui refuserait de le faire serait-il de facto privé de la possibilité d’être retenu en équipe de France, alors même qu’il refuserait de percevoir les éventuelles primes liées à l’utilisation de son image ? 

  • Comment cette convention peut-elle s’articuler avec l’obligation de garantir le respect des libertés fondamentales , et notamment de la liberté d’expression, de ses licenciés ?

• Qu’adviendrait-il, par exemple, d’un joueur qui refuserait de prendre part à des opérations de soutien à l’Ukraine menées par la Fédération ou qui critiquerait ouvertement, dans la presse, la politique fédérale ?

• Que se passerait-il également si la Fédération décidait de s’associer à une entreprise qui serait opposée au contentieux à une société sponsorisant à titre individuel un international ?

Ces quelques exemples suffisent à démontrer que le système actuel a probablement vécu et que l’existence de conventions individuelles, prenant en compte les circonstances particulières propres à chaque joueur, serait probablement plus à même d’éviter à l’avenir la survenance de tels litiges.

• « Sur le fond, je pense que c’est une évidence qu’il y a des choses à améliorer. Sur la forme, on peut en discuter. Beaucoup de joueurs sont confrontés à cette situation. Il faut une évolution et des discussions. »

Raphaël Varane, défenseur de Manchester United Activité : club de football professionnel anglais Partenaires globaux :• TeamViewer (logiciel) : sponsor maillot principal sur 2021-2026, 235 M£ (274,4 M€), soit 47 M£ / saison (54,8 M€ … et de l'équipe de France, à Clairefontaine, le 28/03/2022

Charles Amson

Email : charles.amson@wanadoo.fr
Téléphone : +33683501458

• Avocat au Barreau de Paris.

• Docteur en droit (Université Paris-II-Panthéon-Assas), Charles Amson a soutenu, en 2008, une thèse consacrée à La place de l’arbitrage dans la résolution des litiges sportifs.

• Auteur d’un ouvrage intitulé Droit du sport (Éditions Vuibert) et de nombreux articles dans des revues juridiques, il enseigne le droit du sport dans plusieurs écoles, dont SMS (Sports Management School).

Cabinet Amson : 18, avenue Kléber 75016 Paris

www.cabinet-amson.fr

www.sportetdroit.com


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Cabinet Amson (Amson)
Fondateur / Avocat

Fiche n° 5704, créée le 03/09/2014 à 10:40 - MàJ le 06/10/2021 à 10:39

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